Concertation Yayi, Soglo, Amoussou, Houngbédji… : Pour quels résultats concrets ?

Alors que le Bénin s’apprête à négocier le délicat virage des élections générales en 2026, des visites et concertations sont observées ces dernières semaines entre d’anciens présidents d’institutions du pays. Depuis début février, elles se sont multipliées entre ces hautes personnalités de la République, à savoir Boni Yayi, Nicéphore Dieudonné Soglo, deux anciens présidents de la République ; Adrien Houngbédji, Antoine Idji Kolawolé et Bruno Amoussou, membres de la mouvance présidentielle et anciens présidents de l’Assemblée nationale, ainsi que Théodore Holo et Robert Dossou, deux anciens présidents de la Cour constitutionnelle. Le visiteur principal, qui a fait le tour de tous, est l’ancien chef de l’État, Boni Yayi et président du plus grand parti politique de l’opposition béninoise. Au lendemain de ces entrevues, des questions taraudent toujours les esprits.
Entre début février et mi-mars, l’ancien président béninois de la République, Boni Yayi est allé successivement voir Nicéphore Soglo, Adrien Houngbédji, Bruno Amoussou, Théodore Holo, Robert Dossou et Antoine Kolawolé Idji. Et il est même reparti chez Bruno Amoussou. Par contre, Adrien Houngbédji, lui, n’a pas attendu une deuxième visite. Il s’est plutôt déplacé vers Boni Yayi à son domicile. Si l’on s’en tient aux perspectives de ces rencontres, telles que rendues publiques par l’entourage de Boni Yayi, il y a quelques semaines, “ces acteurs majeurs de la vie politique de notre pays depuis la Conférence nationale pourraient se retrouver dans les jours à venir autour du Patriarche Soglo pour repenser notre vivre-ensemble et soumettre le fruit de leur réflexion au Président de la République”. La finalité de ces concertations répétées est clairement connue. À y voir de près, l’intérêt du Bénin préoccupe ces personnalités, et le commun des mortels devrait saluer l’initiative. Cependant, il y a lieu de s’interroger également sur la suite que l’actuel président Patrice Talon pourrait donner aux conclusions de ces discussions si elles aboutissent effectivement.
Dans sa dernière interview accordée au magazine panafricain Jeune Afrique, le chef de l’État béninois ne semble pas prêt à fléchir ni sur les questions électorales ni à céder aux plaidoyers, en faveur de la libération des détenus politiques et des exilés. Avant même cette prise de parole, Patrice Talon, lors de son discours sur l’état de la Nation devant l’Assemblée nationale le vendredi 20 décembre 2024, et à d’autres occasions, avait déjà adopté cette même posture de fermeté.
“Finie l’usurpation du pouvoir politique par des vendeurs d’illusions incompétents et mal intentionnés. Aucune supplication, aucun râlement, aucune menace ne nous fera reculer. Honorables députés, aucun compromis politique préjudiciable à notre développement ne sera concédé, pour plaire à qui que ce soit ou pour satisfaire un quelconque consensus politique. Le Bénin est au-dessus de tout ; la démocratie et la compétition politique devront, désormais, être exclusivement et absolument au service de notre développement.”, a-t-il souligné devant le Parlement.
À cette allure, quels résultats concrets ou quelles chances pour l’objectif visé par les anciens présidents d’institution de la République ? Ce questionnement, d’autant plus qu’en dehors de la personne de Patrice Talon, la présence de certaines figures politiques majeures telles que Nicéphore Soglo, Adrien Houngbédji, Bruno Amoussou, Antoine Idji, qui par le passé avaient combattu la gestion de Boni Yayi, et pour la plupart aujourd’hui avec l’actuel chef de l’État, permettrait-il une convergence de vues au sein de ce cadre de concertation ? Leur engagement sera-t-il sincère l’un envers l’autre et pour l’intérêt général ?
En clair, sur des sujets sensibles tels que le code électoral, le retour des exilés et la libération des prisonniers dits politiques, si la position de Boni Yayi, Nicéphore Dieudonné Soglo, Adrien Houngbédji, Robert Dossou et Théodore Holo est relativement connue, celle de Bruno Amoussou et Antoine Idji Kolawolé reste tabou. N’est-ce pas là une donne capitale à prendre en considération pour la cohésion et à l’efficacité de ce creuset ? 2026, n’étant plus loin, si “le fruit des réflexions” n’était pas prêt avant le choix des candidats à la présidentielle, de part et d’autre, les considérations politiques et intérêts égoïstes divergents ne tueraient-ils pas le projet dans l’œuf ?
Autant d’incertitudes qui réveillent de doutes quant à l’issue favorable de cette initiative portée par Boni Yayi, président du parti d’opposition Les Démocrates. Étant donné également qu’en politique toutes les tractations et compromissions sont possibles, il n’est pas non plus exclu que les uns et les autres fassent preuve de sursaut patriotique, mettant le pays au-dessus de tout calcul personnel. Pour l’heure, on scrute l’horizon.
Anselme ORICHA