Discours de Houngbédji contre l’exclusion et son appel au dialogue : L’opposition n’a-t-elle pas jubilé trop tôt ?

À son domicile à Porto-Novo, samedi 1er fevrier 2025, lors d’une traditionnelle cérémonie d’échanges de vœux de nouvel an, Adrien Houngbédji s’est lâché devant les militants et autres cadres de son ex-parti, le Prd. L’ancien président de l’Assemblée nationale a tiré à boulets rouges sur la gouvernance de Patrice Talon à laquelle il appartient pourtant à travers le bloc politique Union progressiste Le renouveau.
Si au sein de la majorité au pouvoir l’on tente, dans une levée de boucliers contre le patriarche d’Ajinan, à déconstruire ses propos, du côté de l’opposition par contre, c’est du pain béni. Une bonne occasion de récupération politique tant le discours, sur certains aspects, cadre avec les revendications de l’opposition. Certains membres se sont même déplacés vers l’ancien président du Parlement béninois pour l’en féliciter et explorer, avec lui, des perspectives. En effet sur le plan de la gouvernance politique, Adrien Houngbédji a dénoncé l’exclusion qui caractérise le régime : “(…) 𝙖𝙫𝙚𝙘 𝙘𝙚 𝙦𝙪𝙚 𝙣𝙤𝙪𝙨 𝙖𝙫𝙞𝙤𝙣𝙨 𝙫𝙪 𝙘𝙚𝙩𝙩𝙚 𝙨𝙚𝙢𝙖𝙞𝙣𝙚 : 𝙞𝙡 𝙛𝙖𝙪𝙩 ê𝙩𝙧𝙚 𝙛𝙧𝙖𝙣𝙘 𝙚𝙩 𝙝𝙤𝙣𝙣ê𝙩𝙚, 𝙘’𝙚𝙨𝙩 𝙡𝙖 𝙘𝙤𝙣𝙨é𝙦𝙪𝙚𝙣𝙘𝙚 𝙙𝙚 𝙡’𝙚𝙭𝙘𝙡𝙪𝙨𝙞𝙤𝙣”, affirme-t-il faisant allusion au procès “Complot contre la sûreté de l’État” qui s’est soldé par la condamnation à 20 ans de prison de l’homme d’affaires Olivier Boko, ex-bras droit du président de la République. L’octogénaire a profité de cet énième cas d’emprisonnement ces 9 dernières années pour demander le dialogue, la réconciliation et la paix pour un meilleur vivre-ensemble. “𝘾𝙚 𝙦𝙪𝙞 𝙢𝙚 𝙥𝙧é𝙤𝙘𝙘𝙪𝙥𝙚, 𝙞𝙡 𝙣𝙚 𝙛𝙖𝙪𝙩 𝙥𝙖𝙨 𝙦𝙪’𝙪𝙣 𝙟𝙤𝙪𝙧, 𝙦𝙪𝙚𝙡𝙦𝙪’𝙪𝙣 𝙧𝙚𝙣𝙩𝙧𝙚 𝙥𝙖𝙧 𝙡𝙖 𝙙𝙧𝙤𝙞𝙩𝙚 𝙚𝙩 𝙡’𝙖𝙪𝙩𝙧𝙚 𝙨𝙤𝙧𝙩𝙚 𝙥𝙖𝙧 𝙡𝙖 𝙜𝙖𝙪𝙘𝙝𝙚. 𝙉𝙤𝙪𝙨 𝙙𝙚𝙫𝙤𝙣𝙨 𝙧𝙚𝙨𝙩é𝙨 𝙩𝙤𝙪𝙟𝙤𝙪𝙧𝙨 𝙧𝙖𝙨𝙨𝙚𝙢𝙗𝙡é𝙨 𝙥𝙤𝙪𝙧 𝙘𝙤𝙣𝙨𝙩𝙧𝙪𝙞𝙧𝙚 𝙚𝙣𝙨𝙚𝙢𝙗𝙡𝙚 𝙡𝙚 𝙥𝙖𝙮𝙨”. Pour ce faire, Adrien Houngbédji insiste : “𝘿𝙤𝙣𝙘 𝙢𝙖 𝙘𝙤𝙣𝙫𝙞𝙘𝙩𝙞𝙤𝙣 𝙛𝙤𝙧𝙩𝙚, 𝙘’𝙚𝙨𝙩 𝙦𝙪𝙚 𝙡𝙚𝙨 𝙥𝙧𝙞𝙨𝙤𝙣𝙣𝙞𝙚𝙧𝙨 𝙥𝙤𝙡𝙞𝙩𝙞𝙦𝙪𝙚𝙨, 𝙞𝙡 𝙛𝙖𝙪𝙩 𝙡𝙚𝙨 𝙨𝙤𝙧𝙩𝙞𝙧. 𝙈𝙖 𝙘𝙤𝙣𝙫𝙞𝙘𝙩𝙞𝙤𝙣 𝙛𝙤𝙧𝙩𝙚, 𝙘’𝙚𝙨𝙩 𝙦𝙪𝙚 𝙘𝙚𝙪𝙭 𝙦𝙪𝙞 𝙨𝙤𝙣𝙩 𝙚𝙣 𝙚𝙭𝙞𝙡, 𝙞𝙡 𝙛𝙖𝙪𝙩 𝙦𝙪’𝙞𝙡 𝙧𝙚𝙫𝙞𝙚𝙣𝙣𝙚. 𝘾’𝙚𝙨𝙩 𝙘𝙤𝙢𝙢𝙚 ç𝙖 𝙦𝙪𝙚 𝙣𝙤𝙪𝙨 𝙖𝙫𝙞𝙤𝙣𝙨 𝙛𝙖𝙞𝙩 𝙡𝙖 𝘾𝙤𝙣𝙛é𝙧𝙚𝙣𝙘𝙚 𝙣𝙖𝙩𝙞𝙤𝙣𝙖𝙡𝙚. 𝙅’𝙚𝙣 𝙖𝙥𝙥𝙚𝙡𝙡𝙚 𝙙𝙚 𝙢𝙚𝙨 𝙫œ𝙪𝙭 à 𝙘𝙚 𝙦𝙪𝙚 𝙣𝙤𝙪𝙨 𝙣𝙤𝙪𝙨 𝙧𝙚𝙩𝙧𝙤𝙪𝙫𝙞𝙤𝙣𝙨 𝙨𝙤𝙪𝙨 𝙡’𝙖𝙧𝙗𝙧𝙚 à 𝙥𝙖𝙡𝙖𝙗𝙧𝙚, 𝙦𝙪𝙚 𝙣𝙤𝙪𝙨 𝙢𝙚𝙩𝙩𝙞𝙤𝙣𝙨 𝙩𝙤𝙪𝙩 𝙨𝙪𝙧 𝙩𝙖𝙗𝙡𝙚, 𝙦𝙪𝙚 𝙣𝙤𝙪𝙨 𝙙𝙞𝙨𝙘𝙪𝙩𝙞𝙤𝙣𝙨 𝙙𝙚 𝙘𝙚 𝙦𝙪𝙞 𝙣𝙤𝙪𝙨 𝙤𝙥𝙥𝙤𝙨𝙚 𝙡𝙚𝙨 𝙪𝙣𝙨 𝙖𝙪𝙭 𝙖𝙪𝙩𝙧𝙚𝙨, 𝙦𝙪𝙚 𝙣𝙤𝙪𝙨 𝙩𝙧𝙤𝙪𝙫𝙞𝙤𝙣𝙨 𝙡𝙚𝙨 𝙨𝙤𝙡𝙪𝙩𝙞𝙤𝙣𝙨 𝙦𝙪𝙞 𝙥𝙚𝙧𝙢𝙚𝙩𝙩𝙚𝙣𝙩 à 𝙩𝙤𝙪𝙨 𝙡𝙚𝙨 𝙚𝙣𝙛𝙖𝙣𝙩𝙨 𝙙𝙪 𝘽é𝙣𝙞𝙣 𝙙𝙚 𝙧𝙚𝙨𝙩𝙚𝙧 𝙚𝙣𝙨𝙚𝙢𝙗𝙡𝙚 𝙥𝙤𝙪𝙧 𝙘𝙤𝙣𝙨𝙩𝙧𝙪𝙞𝙧𝙚 𝙡𝙚 𝘽é𝙣𝙞𝙣. 𝙑𝙤𝙞𝙡à 𝙢𝙤𝙣 𝙧ê𝙫𝙚 𝙚𝙩 𝙫𝙤𝙞𝙡à 𝙡𝙚 𝙧ê𝙫𝙚 𝙙𝙪 Prd”. Si l’on s’en tient au propos du patriarche d’Ajinan, cet appel est en phase avec les objectifs du parti arc-en-ciel à sa création. “Nous avions créé le Parti du renouveau démocratique (Prd) en 1990. Cela fait trente cinq (35) ans. Nous rêvions de tirer leçon du passé récent de notre pays. Nous rêvions d’un Bénin de liberté. Nous rêvions d’un Bénin où l’Etat de droit est respecté. Nous rêvions d’un Bénin où la démocratie est le mode de gouvernement. Nous rêvions d’un Bénin dont tous les fils et toutes les filles sont rassemblés”, a déclaré Adrien Houngbédji, qui semble dire, par ailleurs, que ce n’est pas parce que le Prd a fusionné avec une autre formation de la Mouvance qu’il va oublier ses fondamentaux. “Quand nous avions fait la conférence nationale, Kérékou 2, est-ce que vous avez appris que quelqu’un est allé en prison ou que quelqu’un est allé en exil ? Et pourtant, c’est le même Kérékou du Prpb. Quand il a changé, il est devenu un vrai démocrate. Le pays est resté en paix. Je vous dis par là que 𝙘’𝙚𝙨𝙩 𝙡𝙖 𝙢é𝙩𝙝𝙤𝙙𝙚 𝙙𝙪 𝙜𝙤𝙪𝙫𝙚𝙧𝙣𝙚𝙢𝙚𝙣𝙩 𝙦𝙪𝙚 𝙫𝙤𝙪𝙨 𝙚𝙢𝙥𝙡𝙤𝙮𝙚𝙯 𝙦𝙪𝙞 𝙚𝙣𝙩𝙧𝙖î𝙣𝙚 𝙡𝙖 𝙛𝙤𝙧𝙢𝙚 𝙙’𝙤𝙥𝙥𝙤𝙨𝙞𝙩𝙞𝙤𝙣 𝙦𝙪𝙚 𝙫𝙤𝙪𝙨 𝙖𝙫𝙚𝙯. Si vous faites un gouvernement de liberté, qui va se lever pour aller dire qu’il va faire un coup d’Etat ?”, lâche Adrien Houngbédji. Entre autres propos qui ont été favorablement accueillis par l’opposition, qui a salué l’audace du leader des Tchoco tchoco dans un contexte où beaucoup ont peur d’être broyés par le système.
Mais ce que l’opposition n’a pas pris en compte
Adrien Houngbédji a craché dans la soupe Mouvance, et l’opposition s’en réjouit. Cependant, même si l’ancien président de l’Assemblée nationale demande le retour des exilés, la libération des détenus politiques et l’organisation de dialogue, il convient de relever qu’il n’a pas été ferme avec un agenda précis. Adrien Houngbédji aurait voulu que ces trois points soulevés se concrétisent après les élections générales de 2026 ou avant ? En fait-il des exigences, c’est-à-dire des points non négociables ? Le leader de l’ex-Prd conditionne-t-il la non concrétisation de ces points à son divorce d’office d’avec l’Up remettant ainsi en cause l’accord de la création de l’Union progressiste Le renouveau (Up-r) née de la fusion ? Visiblement, non. Que le pouvoir de la Rupture écoute ou pas Houngbédji, c’est du je t’aime moi non plus, et une union scellée pour toujours. Du moins, c’est l’interprétation qu’on peut faire de ce propos du patriarche d’Ajinan que l’opposition n’a pas pris en compte : “𝙉𝙤𝙪𝙨 𝙖𝙫𝙤𝙣𝙨 𝙘𝙧éé 𝙡’𝙐𝙣𝙞𝙤𝙣 p𝙧𝙤𝙜𝙧𝙚𝙨𝙨𝙞𝙨𝙩𝙚 𝙡𝙚 r𝙚𝙣𝙤𝙪𝙫𝙚𝙖𝙪 (𝙐p-r). 𝙉𝙤𝙪𝙨 𝙨𝙤𝙢𝙢𝙚𝙨 𝙢𝙚𝙢𝙗𝙧𝙚𝙨 𝙙𝙚 𝙡’𝙐p-r. 𝙅𝙚 𝙫𝙤𝙪𝙨 𝙡’𝙖𝙞 𝙙𝙞𝙩 𝙥𝙡𝙪𝙨𝙞𝙚𝙪𝙧𝙨 𝙛𝙤𝙞𝙨. 𝙉𝙤𝙪𝙨 𝙣𝙚 𝙨𝙤𝙢𝙢𝙚𝙨 𝙥𝙖𝙨 𝙧𝙚𝙣𝙩𝙧é𝙨 𝙙𝙚𝙙𝙖𝙣𝙨 𝙥𝙤𝙪𝙧 𝙚𝙣 𝙨𝙤𝙧𝙩𝙞𝙧. 𝙉𝙤𝙪𝙨 𝙨𝙤𝙢𝙢𝙚𝙨 𝙧𝙚𝙣𝙩𝙧é𝙨 𝙙𝙚𝙙𝙖𝙣𝙨 𝙥𝙤𝙪𝙧 𝙮 𝙧𝙚𝙨𝙩𝙚𝙧, 𝙢𝙖𝙞𝙨 𝙥𝙖𝙨 𝙥𝙤𝙪𝙧 𝙙𝙞𝙨𝙥𝙖𝙧𝙖î𝙩𝙧𝙚”. L’opposition qui s’apprête à accueillir à bras ouverts un gros morceau ne se serait-elle pas réjouie trop tôt ?
La rédaction