Chef de file de l’opposition : Quelle opposition s’était réunie pour choisir Hounkpè ?

Dans l’alinéa premier de l’article 8 de la loi N°2019-45 du 25 Novembre 2019 portant statut de l’opposition en République du Bénin, il est écrit noir sur blanc : “Est chef de file de l’opposition, le chef du parti politique de l’opposition, ayant le plus grand nombre de députés à l’Assemblée nationale à l’occasion des dernières élections législatives”. Le même article précise le mode de nomination du chef de file de l’opposition. A ce sujet, il est dit : “le chef de file de l’opposition est nommé par décret pris en Conseil des Ministres sur proposition du Conseil électoral de la Commission électorale nationale autonome (CENA)”. Le hic, ce qui d’ailleurs fait polémique depuis quelques jours dans l’opinion, est que lors de sa traditionnelle rencontre avec la presse, le porte-parole du gouvernement, Wilfried Léandre Houngbédji a dit qu’un nouveau chef de file de l’opposition sera nommé dès que le chef de l’État aura un nom proposé par les différentes composantes de l’opposition. Une façon de justifier pourquoi jusque-là le président Patrice Talon n’a pas n’a pas nommé le président du parti d’opposition Les Démocrates qui est de fait la principale force politique de l’opposition au terme des élections législatives du 8 janvier 2023. Pour plusieurs observateurs et analystes de l’actualité politique, c’est surprenant cette réponse du secrétaire général adjoint du gouvernement. À l’analyse, son propos s’écarte du processus pourtant clairement mentionné à l’article 8 de la loi portant statut de l’opposition en République du Bénin. En dehors de la loi sur le statut de l’opposition publiée au journal officiel, y aurait-il d’autres textes qui justifient la réponse donnée par le porte-parole du gouvernement ? En 2020, les forces de l’opposition s’étaient-elles réunies pour proposer Paul Hounkpè, secrétaire exécutif national de la Force cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) au poste de chef de file de l’opposition parce que son parti politique était la première force de l’opposition après les Communales ? La réponse est non. En tout cas des formations politiques se réclamant de cette opposition ne se souviennent pas avoir eu une quelconque concertation jusqu’à envoyer ou proposer le nom de Paul Hounkpè qui fut nommé dans un bref délai par le chef de l’État. Pourquoi en 2023, alors que beaucoup s’attendaient à voir Patrice Talon agir avec la même célérité à propos de la nomination de Éric Houndété, on devrait modifier ou interpréter autrement le mode opératoire, qui du reste n’est pas mentionné sans ambiguïté dans la loi portant statut de l’opposition en république du Bénin? Au sein du parti Les Démocrates, la réplique à la déclaration du porte-parole du gouvernement n’a pas tardé. Invité média de ce dimanche, Kamar Ouassagari, un membre du Bureau national du parti a martelé sur Océan Fm que le parti ne va envoyer aucun nom puisque les textes sont bien clairs et le président du parti Les Démocrates, première force de l’opposition, est connu de tous : son nom, Éric Houndété.

Un bras de fer est-il désormais engagé entre le parti Les Démocrates et le Pouvoir ? Ou bien, à partir de cette fermeté du parti, Patrice Talon va rebrousser chemin, recourir au Conseil électoral et à la Cena en procédant enfin à la prise du décret devant nommer le successeur de Paul Hounkpè, qui, lui, joue les prolongations ? Les prochaines semaines nous renseigneraient d’avantage.

Charles Alban DAHOUI