Upov 1991 : Des agriculteurs sensibilisés par le réseau Jinukun sur les risques qu’encoure le Bénin en adhérant à cette convention
Informer et former les agriculteurs, producteurs et autres responsables d’associations paysannes sur le contenu de l’UPOV 91. C’est la mission que s’est assigné le réseau Jinukun, ce mercredi 12 juillet 2023, à travers un atelier national de formation qui s’est déroulé dans la commune d’Abomey-Calavi. Ils étaient environ une soixantaine de participants, venus des douze départements du pays à prendre part aux assises. Ledit atelier a permis aux organisateurs d’expliquer de fond en comble les enjeux, risques et conséquences de l’adhésion du Bénin à cette convention dénommée UPOV 1991.
<< Nos semences sont attaquées depuis quelques années par des multinationales qui passent par tous les moyens pour nous les arracher… Elles utilisent toutes les méthodes pour que nous puissions perdre nos droits sur nos semences… Et nous devons réagir face à ces manœuvres… >>.
Ainsi se prononçait Pierre Bédiyé, Président du Réseau Jinukun à l’ouverture des travaux de l’atelier national de formation des paysans, producteurs sur l’UPOV 1991.
Au total, six communications ont permis aux participants de comprendre les enjeux liés à l’UPOV 1991. Il convient de retenir des différentes communications que l’UPOV (Union internationale pour la protection des obtentions végétales) a été élaborée par quelques pays industrialisés pour répondre à leurs propres besoins et à ceux de leurs industries, privant notamment les pays du sud de la possibilité de développer des systèmes alternatifs de production des obtentions végétales adaptées à leurs besoins et à leurs priorités.
<< Quand on dit obtention végétales, c’est des résultats de recherche. Donc c’est un groupe de chercheurs qui se donnent des droits sur les résultats de leurs recherches. Et lorsque vous adhérez à l’UPOV 1991, vous devez subir les restrictions ou interdictions de conserver, d’echanger ou de vendre les semences >>, a expliqué le Président de Jinukun.
A en croire Pierre Bédiyé, si les réglementations de l’UPOV doivent être respectées dans les pays ayant signé la convention, alors le fait de se promener avec une poignée de semences dans ses poches, serait un délit. En effet, la loi UPOV interdit la commercialisation des semences non certifiées par les chercheurs.
Selon Patrice Sagbo, l’Upov est non seulement synonyme de la privatisation des semences avec l’imposition des droits de propriété intellectuelle sur les variétés végétales mais aussi la mise sous tutelle et le contrôle des systèmes agricoles et alimentaires.
<< Beaucoup de pays ont compris le piège et ne comptent pas adhérer à cette convention. La preuve en est que depuis une trentaine d’années que l’UPOV existe, seul 5 pays d’Afrique ont adhéré et regrettent déjà. Parmi ces pays, il n’y a aucun pays de l’Afrique de l’ouest. Si cette convention était si bonne, pourquoi les pays ne courent-ils pas pour y adhérer? Et c’est là où nous ne comprenons pas les raisons qui peuvent motiver le Bénin à vouloir franchir le pas…>>, s’est interrogé le communicateur.
Patrice Sagbo encourage les producteurs à poursuivre l’œuvre des aînés, en priorisant les semences locales. Les systèmes semenciers paysans assurent la résilience et la souveraineté alimentaire des peuples. Les semences paysannes ou locales n’ont rien à envier à celles industrielles. Voilà en gros le discours tenu par les membres du réseau Jinukun afin de convaincre les participants à cet atelier national de formation.
<< Les systèmes semenciers paysans en Afrique restent dans le rythme du temps et de l’espace. Ce qui fait que les semences s’adaptent à leur environnement. Elles n’ont pas besoin d’être modifiées pour s’adapter aux changements climatiques. Elles passent du grenier à la terre et de la terre au grenier et tout comme les peuples, s’adaptent à leur temps >>, renseigne Omer Agoligan, membre de la Fédération agroécologique du Bénin (FAEB).
Ce communicateur estime que les systèmes semenciers paysans en Afrique répondent mieux aux besoins de l’alimentation et de l’agriculture des peuples. D’où l’importance selon lui de poursuivre le développement de l’agriculture écologique comme modèle agricole lié aux systèmes semenciers paysans et appropriés aux réalités africaines.
<< Il vaut mieux développer ce que nous maîtrisons le mieux que de courir vers quelque chose dont on ne maîtrise le sens >>, a conclu Omer Agoligan.
A noter que c’est la énième activité initiée par le réseau Jinukun pour attirer l’attention des uns et des autres sur les risques encourus par le Bénin en adhérant à l’UPOV.
Marcus Koudjènoumè (Coll)