Nomination des ministres conseillers : Talon attend-il de faire une purge dans la mouvance ?

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Depuis plusieurs mois, la scène politique béninoise est marquée par un suspense inattendu. Malgré l’adoption d’un décret autorisant la nomination de ministres conseillers à la Présidence de la République, la mise en œuvre de cette décision tarde encore. Cet immobilisme, en apparence anodin, cache en réalité des manœuvres stratégiques complexes, où se mêlent prudence politique, fidélité et calculs électoraux. La récente décision de la Cour constitutionnelle, qui valide la légalité de ce décret, semble n’avoir apporté aucune accélération concrète, laissant planer des interrogations sur les motivations profondes du Président Patrice Talon.

Une attente longue et frustrante

Les soutiens du chef de l’État attendaient avec impatience la mise en application du décret, espérant voir récompensée leur loyauté. Pour ces alliés, la nomination de ministres conseillers est perçue comme une reconnaissance politique de leur fidélité au régime. Toutefois, cette attente devient pesante. Malgré le feu vert juridique donné par la Cour constitutionnelle en mai 2023, Patrice Talon n’a toujours pas procédé aux nominations attendues, suscitant des frustrations et des spéculations sur ses intentions réelles.

La prudence de Talon face aux scandales internes

L’un des éléments-clés qui semble freiner la mise en œuvre de ces nominations est l’affaire Steve Amoussou, une controverse qui a secoué la majorité présidentielle. Des rumeurs persistantes accusent certains membres de la mouvance d’avoir divulgué des informations sensibles au célèbre chroniqueur “Frère Hounvi”, ce qui remet en question leur fidélité au Président. Patrice Talon, connu pour sa gestion méticuleuse et son approche pragmatique du pouvoir, semble vouloir évaluer minutieusement la loyauté de ses alliés avant de procéder à des nominations sensibles.

En effet, cette affaire a exacerbé les suspicions au sein de la majorité, et l’attitude de Talon laisse à penser qu’il préfère attendre les résultats des procédures judiciaires liées à cette affaire, notamment le procès fixé au 7 octobre 2024, avant de faire des choix définitifs. Le chef de l’Etat semble vouloir s’assurer de la fiabilité de son entourage avant de confier des responsabilités importantes à ses proches collaborateurs.

Un contexte électoral sous-jacent

En toile de fond de cette prudence, se profilent les élections générales de 2026. Patrice Talon, qui a toujours fait preuve d’une grande habileté dans la gestion de ses alliances politiques, semble être en train de préparer le terrain pour les prochaines échéances électorales. En retardant les nominations, il laisse planer une incertitude qui permet de maintenir ses soutiens dans une posture d’attente, voire de dépendance, tout en s’assurant qu’aucune trahison ne viendra affaiblir son camp dans la dernière ligne droite vers les élections.

La non-application du décret portant nomination des ministres conseillers à la Présidence est loin d’être un simple retard administratif. Elle est le reflet d’une stratégie politique plus large, où Patrice Talon cherche à consolider ses soutiens tout en évitant de précipiter des décisions qui pourraient affaiblir son pouvoir. Face aux attentes croissantes de ses alliés, le président béninois semble jouer la carte de la prudence, notamment dans un contexte marqué par des scandales internes et l’approche des élections de 2026. Reste à voir si, après l’épisode judiciaire de l’affaire Steve Amoussou, Talon prendra enfin les décisions tant attendues.

Anselme ORICHA